L'image du moi(s)


Chaque mois, petit billet d'humeur et d'humour à partir d'images conservées aux Archives. Forcément décalé !

Image du moi(s) - année 2015


Portrait d'un enfant habillé en zouave, 5 janvier 1908, Henry Delgay, photographie N&B, 10,5 x 6,5 cm. Archives municipales de Toulouse, 1 Fi 6.

janvier 2015


Zouave or zouave not ? (en z'avoir ou pas ?)

De quoi sera faite cette nouvelle année ? Que nous apportera-t-elle dans sa petite sacoche ? Des z'amours ? C'est possible. Des z'emmerdes ? C'est probable. Des z'Aznavours ? Je ne peux pas dire. Y-aura-t'il de ces personnalités z'excentriques, mais néanmoins z'expertes, qui comme l'année passée viendront régulièrement sévir dans nos z'actualités ?  A cette question je réponds ouiiiiz.
En revanche, à ce regard enfantin qui semble nous demander : «Pourquoi m'a-t-on habillé de la sorte ?» on ne peu répondre que : « Pour rigoler ». Il n'y a pas à dire, on savait rire à l'époque. Pourtant est-ce uniquement la moquerie qui a motivé cette séance photographique dans le studio de Henry Delgay à Toulouse le 5 janvier 1908 ? Certes, le costume de zouave est au choix ridicule ou mignon, mais c'est avant tout un uniforme d'un corps singulier qui a fait la réputation militaire de la France.
Son nom provient d'une tribu berbère, les Zouaoua, qui composait une large partie de l'infanterie ottomane de la régence d'Alger qui a été intégrée au sein de l'armée française lors de la conquête de l'Algérie en 1831. Ce corps s'est notamment illustré lors de la guerre de Crimée en 1852-1854. Des unités similaires ont été créées dans de nombreux pays, notamment aux Etats-Unis où le bataillon des zouaves de Coppens de Louisiane avait pour hymne de guerre le « Rondeau des Zou Zou ».

Lors de la première guerre mondiale l'uniforme chatoyant des zouaves français, inspiré de la tenue traditionnelle masculine algérienne, a été adapté aux nouvelles conditions de combat.

Buvard publicitaire pour le chewing-gum Yellowny produit par les Cachou Lajaunie, représentant une tablette de chewing-gum et une boite de cachous, années 1950, B. Sirven imprimeur, Toulouse, buvard imprimé, 14 x 21 cm. Archives municipales de Toulouse, 45 Fi 463.

février 2015


Févriary, le mois mi-french, mi-ricain

Le 6 février 1778, était signé le traité d'alliance franco-américaine inaugurant 237 années de relations tumultueuses entre le pays du vieux continent et la jeune nation. Aux grandes déclarations d'amour dont témoignent, entre autre, le culte autour du marquis de Lafayette de l'autre côté de l'Atlantique, la statue de la Liberté offerte par le peuple français aux Etats-Unis, l'américaine Joséphine Baker chantant « J'ai deux amours, mon pays et Paris » ou le français Michel Sardou s'exclamant en 1967 « Si les Ricains n'étaient pas là, vous seriez tous en Germanie », répondent des phases de refroidissement révélées par la censure de cette dernière chanson par le pouvoir gaulliste.

Dès la fin du XVIIIe siècle une quasi-guerre opposa la France révolutionnaire et l'Amérique de John Adams. Mais c'est au cours de XXe et XXIe siècle que vont se développer l'antiaméricanisme et le « French bashing » de part et d'autre de l'océan ; aux impérialistes, naïfs et obèses sont opposés les «singes capitulards bouffeurs de fromage ».
Néanmoins la culture américaine fut largement plébiscitée dans la France de l'après seconde guerre mondiale où un nom à consonance étasunienne était doté d'une aura indéniable. Ainsi lançant une marque de chewing-gum la société des Cachou Lajaunie créa Yellowny, traduction quelque peu littérale de son nom. De même en 1952, misant aussi sur le rêve américain, fut créée la marque Hollywood chewing-gum ; en même temps qui aurait acheté de la pâte à mâcher Sacré-Bois ?

Projet de construction d'une buvette-laiterie au Jardin des Plantes, novembre 1881, plan manuscrit, 36,5 x 38 cm. Ville de Toulouse, Archives municipales, 64 Fi 7639 (détail).

mars 2015


Laiterie de mars

Le mois de mars est un vrai bazar. On dirait mon bureau. La météo change d'une minute à l'autre, l'hiver s'en va, le printemps revient, les jours rallongent, les plantes bourgeonnent et les animaux s'affolent. Avec ce remue-ménage on se sent un peu contraint de s'agiter, et s'il y a bien une activité que j'aime pratiquer à cette époque de l'année c'est virer plein de trucs. Ça s'appelle le grand nettoyage de printemps.
Même si la tentation est grande d'évacuer dans le plus grand désordre un maximum de choses il faut savoir faire preuve de méthode : trier ce qui doit partir et ce qui peut rester, remiser les habits chauds et déprimants de l'hiver dans des armoires où ils resteront jusqu'en décembre, ranger l'appareil à raclette sur l'étagère inaccessible de la cuisine (il y en a toujours une), mais surtout faire le deuil des résolutions aussi ridicules qu'éphémères prises au début de l'année. Par exemple, j'avais décidé aux premiers jours de 2015 de ranger mon bureau. Je me rends compte aujourd'hui que cela n'a plus aucun sens et qu'il faut savoir accepter le chaos du monde et accessoirement celui qui règne sur ma table de travail.
De ce maelstrom de documents pourra ainsi émerger une révélation, tel ce projet d'installation d'une buvette-laiterie dans le Jardin des Plantes en novembre 1881. Certes, l'ambiance dans ce type d'établissement ne devait pas toujours être à la rigolade, mais on imagine une atmosphère – très – jeune et détendue où les clients pouvaient entonner sans crainte le chant de la sobriété : « Je chante l'eau et le lait, la France se réjouit, je suis au cœur du vrai, je vois clair dans la nuit ».

avril 2015


En avril, mets tes espadrilles !

Affiche de propagande antifasciste « Aixafem el Feixisme » [écrasons le fascisme], reproduisant la photo d'un pied chaussé d'une espadrille écrasant une croix-gammée, 1936-1939, Catala (photo), Comisaria de propaganda de la Generalitat de Catalunya, Barcelone, 108 x 80 cm. Ville de Toulouse, Archives municipales, 11 Fi 364 (détail).Dans les années 1980 un spot publicitaire, voulant remettre au goût du jour les espadrilles, nous invitait à pratiquer toutes sortes de loisirs en sandalettes : danser le disco, faire du vélo et bye bye boulot. Cependant, la réalité était toute autre et les Nuls ont eu beau jeu de parodier cette réclame en énonçant quelques vérités crues sur lesdites chaussures : « En espadrille, on a l'air d'un con, on a des ampoules (…), ça pue des pieds (…) En espadrille, tu rachètes une paire au bout de trois semaines ».

Il existe toutefois une activité à exercer espadrilles aux pieds qui n'avait été recensée ni par ses zélateurs, ni par ses contempteurs : écraser le fascisme. Certes, ce n'est pas donné à tout le monde. Le commun se contente généralement d'écraser des déjections canines. Mais le fascisme étant par définition rampant, il peut se trouver d'un moment à l'autre à portée de tatane. Dans ce cas là, aucune hésitation. Enfin, c'est vite dit... Car si le fascisme est rampant, il n'en est pas moins souvent chaussé de boots en cuir coquées ou ferrées à côté desquelles vos espadrilles paraissent un peu frêles. Il faut en convenir, écraser le fascisme n'est pas chose facile.
Pour cette raison, il faut rendre hommage à ceux qui l'on combattu par le passé à une époque où il fleurissait à travers l'Europe. En ce mois où nous célébrerons, le 26 avril prochain, le triste 78e anniversaire du bombardement de Guernica par l'aviation des puissances de l'Axe, nous pensons particulièrement aux hommes et aux femmes qui luttèrent de l'autre côté des Pyrénées. Témoin de cette lutte tant sur les champs de bataille que dans les consciences, cette affiche catalane explicite. Bon, c'est vrai que le coup de l'espadrille ce n'est pas super crédible, ils auraient dû mettre autre chose à la place. Un truc qui résiste (contrairement aux espadrilles), pas commode, têtu. En fait, ils auraient dû y mettre un âne, un vrai ruc català.

Affiche de propagande antifasciste « Aixafem el Feixisme » [écrasons le fascisme], reproduisant la photo d'un pied chaussé d'une espadrille écrasant une croix-gammée, 1936-1939, Catala (photo), Comisaria de propaganda de la Generalitat de Catalunya, Barcelone, 108 x 80 cm. Ville de Toulouse, Archives municipales, 11 Fi 364.

Carte publicitaire pour des produits cosmétiques (Sublimior, Niger) en vente chez Laurent Fauré, coiffeur-parfumeur, 15 arcades du Capitole, représentant une danse de bohémiens au XIIIe siècle, 1879-1899, chromolithographie, 7,5 x 11 cm, Archives municipales, 14 Fi 486

mai 2015


Mai m'émeut (poème)

Comme les sanglots longs des violons de l'automne
Comme le son du cor, le soir, au fond des bois
Mai m'émeut.
Comme le brin de muguet et le gai rossignol
Comme la rosée bleue et les bleuets des champs
Mai m'émeut.
Comme le cri du hibou sous les cieux étoilés
Comme le « meuh ! » de la vache à l'ombre d'un pommier
Mai m'émeut.
Mais une danse gitane, si endiablée soit elle
Au dos d'une réclame contre la chute des cheveux
Même si elle m'amuse, m'émeut moins.

Incendie de l'église de Lalande, 20 juin 1961, négatif N&B, André Cros, 6 x 6 cm, Archives municipales, 53 Fi 947

juin 2015


Feu le mois de juin

Je me souviens d'une époque où le mois de juin constituait, pour nous, un avant-goût des vacances. Nous allions en cours un peu comme à la pêche, sachant que la journée se passerait en jeux de société, parties de foot et autres loteries surprises. Il me semble même y avoir gagné un Goldorak en plastique d'un mètre de haut. On en aurait presque aimé l'école.
Ces temps-là sont aujourd'hui révolus. Certes, le vendredi après-midi est un peu notre mois de juin hebdomadaire ; ce ne sont pas vraiment des congés, mais ce n'est déjà plus le travail. Toutefois, rien à voir avec l'excitation que l'on pouvait ressentir aux prémices de l'été. Même en terminale où l'on préparait le bac en mangeant des cerises devant les retransmissions de Roland-Garros, nous savions qu'après la fatale échéance viendraient les vacances.
Disparu le juin de nos jeunes années ! Parti en fumée ! Comme l'église de Lalande, qui fut ravagée par un incendie dans l'après-midi du 20 juin 1961. Notons au passage l'ironie de la date, la veille de la fête de la Saint-Jean où traditionnellement on danse et saute au dessus d'un brasier pour célébrer le solstice d'été. Ce jour-là le curé de Lalande a eu sa fête avant l'heure.

 

Feu d'artifice du 14 juillet 1986 à la prairie des Filtres, diapositive couleur, Service de communication de la ville de Toulouse, 6 x 6 cm, Archives municipales, 15 Fi 3999/7

juillet 2015


Flammes des années 80 (en juillet)

Le 14 juillet 1986 un photographe du service de communication de la Ville de Toulouse réalisait un reportage sur le feu d'artifice tiré depuis la prairie des Filtres. C'est amusant de voir comme le temps passant embellit le passé. Ainsi 1986 évoque des souvenirs plutôt sympathiques : le minitel, le walkman, le lycée, La folle journée de Ferris Bueller de John Hugues, l'album Black Celebration  de Depeche Mode. Mais on oublie un peu facilement que les chansons françaises les plus populaires de l'année furent Les démons de minuit du groupe Images, Ouragan de Stéphanie de Monaco et L'Aziza de Daniel Balavoine. Ça fait réfléchir.

Les années 1980 étaient-elles si idylliques ? Au regard du chômage, des attentats, de l'explosion de Tchernobyl, de l'album Entre gris-clair et gris-foncé (le titre le plus catastrophique de tous les temps) on peut en douter. Les jours que nous vivons doivent être réellement sombres pour entretenir une nostalgie des eighties. A bien y réfléchir je préfère encore les années 1970 avec leurs cheveux longs et gras.

Le colonel Marcel Bigeard se baigne dans l'Ariège après sont footing quotidien à Lacroix-Falgarde (Haute-Garonne), 30 août 1966, André Cros, négatif N&B, 6 x 6 cm. Ville de Toulouse, Archives municipales, 53 Fi 5511.

août 2015


Qui est in, qui est août ?

A l'heure où les villes se vident et les plages se remplissent. A l'heure où aoûtiens et aoûtats se chamaillent dans les campings. Certains restent fidèles au poste et il faut bien reconnaître que ce sont souvent les meilleurs. Quand on y réfléchit, c'est tellement convenu de prendre ses vacances en août ; tout le monde fait ça ! C'est comme les photographies souvenirs à la plage, on devrait les interdire. Que celui, ou celle, qui n'e s'est jamais ridiculisé en tenue de bain me jette la première tong.

Bigeard, lui, ne se pose pas ce genre de question. Il se lève à cinq heures du matin, il court vingt kilomètres et ensuite, comme il a chaud, il va plonger dans l'Ariège. Il s'en fout que son maillot soit tout pourri ; il s'en fout aussi que son shampoing ne respecte pas la couche d'ozone. Pire ! Ça le fait marrer toutes ces conneries. Faut dire qu'il en a vu d'autres le Marcel.

Admiré par les uns, honni par les autres, cet homme du rang devenu général s'est illustré durant le second conflit mondial et les guerres coloniales. Au milieu des années 1960, il prend durant quelques années le commandement de la 20e brigade parachutiste basée à Toulouse, c'est à cette occasion que ce cliché est réalisé. Considéré comme un "août-sider", parfois comme "août-law", il est, depuis le 9 juin 2010, définitivement "août of order".

Société Toulousaine d'Electricité, vers 1910, B. Sirven, imprimeur, éditeur à Toulouse et Paris, chromolithographie. Ville de Toulouse, Archives municipales, 10 Fi 1694 (détail).

septembre 2015


Sept ambres, mois des initiés

Telle une divinité aillée survolant la ville, apportant la lumière au commun des mortels, voici ces quelques mots qui vous éclaireront et lèveront le voile de la Toulouse mystique.

Le saviez-vous ? La première vue réaliste/mythique de Toulouse a été achevée d'imprimer le 14 juillet 1515. Convenez que cette date a quelque chose d'incongru. Un peu comme si François Ier avait pris la Bastille, ou que les sans-culottes avaient gagné la bataille de Marignan. Néanmoins, ce n'est pas la chose la plus étrange qui a trait à cette estampe. En effet, en son centre se tient un personnage pour le moins mystérieux. Si l'on en croit l'ouvrage dont elle est extraite, il s'agit du fondateur de Toulouse, le roi Lémosin, fils de Thubal, petit-fils de Japhet et donc arrière petit-fils de Noé. Ainsi, non seulement Toulouse serait l'une des villes les plus anciennes du monde mais de plus elle serait reliée directement à l'homme qui sauva la terre du déluge. Toutefois, cela ne l'empêcha pas d'être submergée par l'inondation des 23 et 24 juin 1875.

Tous les documents qui ont été utilisés dans cette chronique sont visibles dans l'exposition Toulouse en vue(s) 1515-2015 qui se tient au réfectoire du couvent des Jacobins jusqu'en janvier 2016.

Jean Rieux, maire de Toulouse, visite le chantier de construction du pont des Catalans, octobre 1907, photographie N&B, 18 x 24 cm. Ville de Toulouse, Archives municipales, 2 Fi 1580.

octobre 2015


Octobre, tu m'automne !

On a beau être maire de Toulouse on n'en est pas moins homme. Jean Rieux, comme n'importe quel puceau du samedi soir, n'a pu résister à l'occasion d'épater sa minette. Quand ses copains du conseil municipal lui ont appris, tout excités, qu'ils allaient visiter le chantier de construction du pont des Catalans, comme c'était lui le chef il a dit : « Moi je viens avec ma copine ».

Ils n'ont pas protesté, les gars du conseil, mais on ne peut pas dire qu'ils ont sauté au plafond de joie. Avec les filles c'est jamais simple, on ne peut pas faire ci, on ne peut pas dire ça ; bref, on n'est pas à son aise. En plus, figurez-vous que la nana en question elle voulait des photos pour immortaliser l'aventure.

Ouh là là, super galère le coup des clichetons. Parce que je ne sais pas si vous êtes au courant, mais les donzelles, quoi que vous fassiez, elles ne se trouvent jamais à leur avantage sur la pellicule. Et ce n'est pas la faute de leurs chapeaux ridicules ou de leur robes hideuses, non, c'est toujours la faute du photographe. Alors les conseillers, ils étaient un peu circonspects. Mais il y en a un qui a eu une idée : « On va faire des photos de loin ». Et c'est ce qu'ils ont fait. C'était en octobre 1907. Automnant non ?

Une course à Satanville, vers 1865, Louis Alfred Habert (sculpteur), photographie stéréoscopique N&B, 8,6 x 17,4 cm. Ville de Toulouse, Archives municipales, 25 Fi 86 (détail).

novembre 2015


Novembre, c'est mortel

Quel meilleur mois que celui de novembre pour s'interroger sur la fatale issue qui nous guette tous. L'ambiance semble en effet propice tant la mort plane sur cette période de l'année comme un kamikaze japonais au dessus d'un porte-avions américain. Certes, la Grande Faucheuse n'est pas un sujet que l'on aborde de bon gré avec sa poissonnière ou son podologue, mais il est une catégorie de la population qu'elle fascine particulièrement : les adolescents.

On a tous vu ces petits zombies pâles aux yeux charbonneux arborant des t-shirts à tête de mort où sont inscrits les noms de groupes fleurant bon le satanisme et la morbidité : « Deicide », « Cannibal Corpse », « Morbid Angel », « Entombed » pour les métaleux ; « Christian Death », « Death Cult », « Siouxie and the Banshees » pour les gothiques ; « Marylin Manson », « Ramstein » pour les blaireaux.

Vous allez dire que j'exagère, que j'essentialise, que tous les ados ne sont pas des sociopathes en puissance. C'est vrai, mais d'un autre côté, à part des jeunes et certains aristocrates des Carpates, vous connaissez beaucoup de personnes qui affectionnent les visites nocturnes dans les cimetières ? D'ailleurs, et c'est une preuve, le nombre d'octogénaires ayant profané des tombes est quasiment nul ; en même temps c'est compréhensible, ce serait un peu comme s'ils vandalisaient leur propre maison.

Décidément la psyché juvénile recèle, pour moi, bien des mystères. Peut-être aurais-je obtenu quelques explications en interrogeant des étudiants en psychologie lors de mon passage à l'université. Mais à l'époque personne ne leur parlait. Il faut dire, à notre décharge, que les gars de psycho portaient des sandalettes nu-pieds et les filles des pantalons Johnny Clegg style. Même avec toute la bonne volonté du monde, il y a des limites à la sociabilité.

Affiche publicitaire pour la huitième fête annuelle de la Société de protection mutuelle et de retraite des voyageurs de commerce de la ville de Toulouse et du Sud-Ouest , 31 décembre 1904, Satgé, chromolithographie, 146 x 113 cm. Ville de Toulouse, Archives municipales, 10 Fi 1542 (détail).

décembre 2015


Highway to Noël

L'expression "l'enfer est pavé de bonnes intentions" semble avoir été forgée pour la période des fêtes de fin d'année. Cette accumulation de bonheur, de joie, et de réjouissance obligatoires sur un laps de temps si court a de quoi vous rendre neurasthénique. S'il existe un enfer, il doit ressembler aux dix derniers jour du mois de décembre.

Paradoxalement, à l'origine de toute cette histoire il y avait quand même ce gars barbu qui racontait partout qu'il fallait aimer son prochain. Bon, il disait aussi qu'il était le fils de Dieu, ça situe le personnage. Au bout d'un moment, ça n'a pas fait un pli, il a fini par énerver tout le monde. Résultat il a été cloué sur une croix.

Le châtiment paraît un peu disproportionné, mais en même temps je peux comprendre. Ça me rappelle la fac. Il y avait toujours ce type avec des cheveux longs, lunettes et keffieh autour du cou, qui voulait absolument parler à tous les gens qu'il croisait de la paix dans le monde et de l'amour que nous devions porter à nos semblables. Personnellement, j'ai fini par développer des envies homicides à son égard et je pense que je n'étais pas le seul. Pour peu que nous ayons eu deux planches, des clous et un marteau à portée de main cela aurait pu très mal finir.

Toutefois, soyons honnête, avant même les tribulations du Nazaréen cette période de l'année était déjà marquée par les festivités du solstice d'hiver. Il faut croire qu'ils ne devaient pas beaucoup rigoler à l'époque pour célébrer le jour le plus court de l'année. Partant, ils auraient aussi bien pu organiser une fête pour le jour le plus humide de l'année, le plus ridicule, voire même le plus glauque de l'année ; ils auraient ainsi pu faire la fête quotidiennement. Imaginez, c'est comme si aujourd'hui chaque date du calendrier correspondait à une célébration absurde du style : la fête de la musique, la journée de la gentillesse, la fête des voisins, la journée de la sensibilisation aux passages à niveaux...

Même si quelques illuminés honorent encore le solstice hivernal, la majeure partie de la population fête le passage à la nouvelle année le 31 décembre. Généralement c'est encore plus déprimant que Noël, mais pour ceux, à l'instar des voyageurs de commerce de Toulouse et du Sud-Ouest de l'année 1904, qui exercent des professions cafardeuses et qui passent le réveillon avec leur collègues, il y a vraiment de quoi se pendre au lustre avec des cotillons.